La poétique de l’espace : une topographie de la mémoire du trauma dans Peut-Être Esther de Katja Petrovskaïa

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Peut-être Esther est un récit publié en 2014 qui s’inscrit dans la tradition de la génération de la post‑mémoire à laquelle appartient l’autrice, Katja Petrowskaja, d’origine juive et russe. Développé par Marianne Hirsch, le concept de post‑mémoire concerne une structure (2012, 5) de transfert inter ou transgénérationel d’une mémoire traumatique, qui laisse place au travail de l’imagination :

In my reading, postmemory is distinguished from memory by generational distance and from history by deep personal connection. Postmemory is a very powerful and very particular form of memory precisely because its connection to its object or source is mediated not through recollection but through an imaginative investment and creation (Hirsch 1997, 22).

En tentant de reconstituer son histoire familiale, Katja Petrowskaja est confrontée à la difficulté de retrouver un passé détruit par la Seconde Guerre mondiale et l’Holocauste. Entre biographie et fiction, cette œuvre hybride permet de faire évoluer les rapports entre mémoire et Histoire, de même que l’expression d’un deuil, malgré un trauma qui serait autrement qualifié d’indicible. Une volonté de réconciliation est perceptible dans la démarche de l’autrice, qui a choisi d’écrire dans sa langue seconde, l’allemand, dont l’empreinte d’un passé nazi est subvertie pour répondre aux besoins d’un présent pacifié. En analysant l’imbrication de ces différents thèmes, je chercherai dans cet article à définir une poétique de l’espace de la mémoire. Je me demanderai ainsi en quoi les enjeux de la post‑mémoire sont transposés dans la topographie des lieux de trauma développée au cours de ce récit, qui redéfinit dès lors l’espace mémoriel. Dans le cas d’événements traumatiques, les lieux en viennent en effet souvent à surreprésenter l’horreur ou, a contrario, à en éliminer le souvenir en raison des choix politiques qui en officialisent le récit ou qui, lorsque des questions de responsabilités entrent en ligne de compte, en éliminent les traces. Échappant à une écriture politique et officielle de ce qu’on connaît sous l’expression de « lieu de mémoire » (Nora 1997), le récit Peut-être Esther met en évidence les notions d’héritage, d’oubli et de création qui caractérisent la post‑mémoire et qui se trouvent au cœur des rapports entretenus avec l’espace géographique du trauma.

Dans cette analyse, j’aborderai tout d’abord la manière dont la notion d’espace permet au récit de représenter métaphoriquement les enjeux de la mémoire. Il s’agira ensuite de présenter comment une mémoire indépendante peut habiter un lieu de trauma et, finalement, de réfléchir à une problématique inhérente à l’œuvre : comment commémorer un lieu de trauma? Cette question permettra d’éclairer les rapports qui lient la mémoire à l’espace.

Les métaphores spatiales de la mémoire

La représentation du passé a fait l’objet de réflexions renouvelées au XXe siècle, et ce, en réaction aux différentes problématiques apparues, notamment avec l’accélération du temps de l’Histoire qui « correspond à une multiplication d’événements le plus souvent non prévus par les économistes, les historiens ou les sociologues » (Augé 1992, 40). Devant ce nouveau paradigme temporel de la « surmodernité » (42), les historiens « éprouvent de grandes difficultés non seulement à faire du temps un principe d’intelligibilité, mais, plus encore, à y inscrire un principe d’identité. Aussi bien les voyons‑nous privilégier certains grands thèmes dits “anthropologiques” (la famille, la vie privée, les lieux de mémoire) » (37). L’anthropologie et les notions d’espace qui lui sont propres sont ainsi venues enrichir le champ des historiens pour établir les lieux d’une histoire collective, menacée par « la surabondance événementielle du monde contemporain » (43).

Une contribution importante à ce déplacement épistémologique de l’histoire est celle de Pierre Nora, qui a introduit le concept de « lieux de mémoire », qu’il définit ainsi : « Ces lieux, il fallait les entendre à tous les sens du mot, du plus matériel et concret, comme les monuments aux morts et les Archives nationales, au plus abstrait et intellectuellement construit, comme la notion de lignage, de génération, ou même de région et d’“homme mémoire” » (1997, 15). Si les lieux de mémoire sont multiples, ils ont toutefois une essence commune qui se situe à trois niveaux : chaque lieu de mémoire est « matériel, symbolique et fonctionnel, mais simultanément » (37). Pierre Nora donne l’exemple d’une archive, objet matériel et fonctionnel qui devient un lieu de mémoire lorsque « l’imagination l’investit d’une aura symbolique » (37), ou encore celui de la minute de silence, une action fortement symbolique qui devient lieu de mémoire par le « découpage matériel d’une unité temporelle » (37) et par sa fonction de rappel périodique. Le lieu de mémoire est donc un lieu polysémique qui cristallise dans l’objet une mémoire collective afin que, par un travail de commémoration officialisé, le passé puisse être défini et représenté, et l’oubli, contré.

Dans le sens où l’entend Pierre Nora, nous pouvons ainsi affirmer que les bâtiments désaffectés du camp d’Auschwitz autant que l’œuvre littéraire Si c’est un homme (1947) de Primo Levi sont des lieux de mémoire pour les victimes de l’Holocauste. Toutefois, si cette notion permet d’entretenir un rapport à l’Histoire en l’inscrivant dans des lieux de mémoire officiels, qu’en est‑il du rapport de l’individu face aux lieux de traumas ignorés, déformés ou encore muets? Qu’en est‑il d’une histoire tragique qui ne peut se lire aussi simplement qu’une plaque commémorative? Maria Roca Lizarazu introduit, dans son analyse du récit de Katja Petrowskaja, la notion de « nœuds de mémoires », développée par Michael Rothberg : « Rothberg’s nodes or knots are meant to critique Pierre Nora’s classic “lieux de mémoires” by stressing history’s messy entanglements (especially France’s colonial past) and the dynamic character of collective memory » (2018, 184). Les lieux de mémoire ne constituent donc que la partie officielle de l’Histoire à laquelle l’autrice et narratrice ajoute de nouvelles images pour rendre compte des complexités de la mémoire du passé. C’est en effet à partir d’un acte révélateur et instinctif de sa grand‑mère Rosa que la narratrice en vient à proposer une réflexion sensible et originale sur l’Histoire. Dans les dernières années de sa vie, faisant face à une cécité grandissante, sa babouchka a entrepris d’écrire ses mémoires pour se défaire des souvenirs angoissants qu’elle ne voulait pas emmener avec elle dans la solitude de la mort. Ce faisant, elle ne cherchait pas à offrir à ses potentiel·le·s lecteur·rice·s un récit testimonial, ce que révèlent ses lignes d’écriture qui se superposent les unes aux autres au point d’être illisibles :

Une ligne se prolongeait dans la suivante, une autre s’y superposait, elles se recouvraient comme des vagues de sable sur la plage […]. Certains passages étaient aussi inextricables que de la laine emmêlée, les prix de la pomme de terre à la fin des années quatre‑vingt se nouaient avec les récits de guerre et de rencontres fugaces. […] J’ai cru pendant des années qu’on pourrait les déchiffrer, […] jusqu’au jour où j’ai compris que les écrits de Rosa n’avaient pas été conçus pour être lus, mais pour être conservés, un épais fil d’Ariane indéchiffrable. (Petrowskaja 2015, 61)

Dans ce passage bref, plusieurs métaphores sont offertes. Tout d’abord, celle d’un fil indémêlable où l’histoire personnelle, pragmatique, l’histoire d’un vécu quotidien (« les prix de la pomme de terre »), est indissociable de l’Histoire, des « récits de guerre », à laquelle elle a survécu. Dans sa quête d’un récit généalogique, la quatrième génération1, qui est représentée ici par la narratrice, se doit de chercher dans la macro‑histoire les clés qui lui permettent de comprendre la micro‑histoire2 et inversement. Ensuite, la comparaison des souvenirs de Rosa aux « vagues » qui se recouvrent les unes les autres présente une mémoire de la superposition, formée comme un palimpseste, une mémoire où le temps n’est pas vécu de façon linéaire, mais toujours en mouvement et au même endroit. Les différents fils ou moments de cette mémoire s’entrelacent au point d’être totalement illisibles pour les générations ultérieures. Enfin, Maria Roca Lizarazu perçoit dans la référence au fil d’Ariane, « a sense of being lost » (2018, 178). L’interprétation transposée du mythe présente ainsi l’image d’une mémoire qui ne peut plus retrouver le centre du labyrinthe, c’est-à-dire la vérité historique. Les sources restantes deviennent objets de confusion, rendant impossible l’accès au savoir de la mémoire : « Rosa’s “Spitzengekritzel” symbolizes a history that is somehow “there” (Rosa has indeed written down her memoirs), yet impossible fully to decipher » (178). Les souvenirs de la grand‑mère de la narratrice témoignent d’un passé qui paraît – il est là – mais qui reste opaque, ne faisant qu’acte de présence muette. Précisons également que l’écriture illisible de Rosa renvoie à une narration impossible. L’héritage de la mémoire n’est ici plus la garantie d’un accès au passé, mais c’est l’incapacité de la mémoire à se rendre transparente dans l’histoire du trauma qui est soulignée dans ce passage.

Une dernière image spatiale de la mémoire se trouve dans le monde virtuel. Les références à Internet parsèment le récit et le dirigent. La toile Internet renvoie à une nouvelle méthode de recherche mémorielle pour la génération de Katja Petrowskaja qui est connectée à un univers immatériel et pourtant fluide, dépassant les contraintes d’espace‑temps. En guise d’exemples, nous pouvons citer le chapitre d’introduction intitulé « Google soit loué », où le moteur de recherche Google a permis la rencontre entre la narratrice et un couple de Juifs également à la recherche de leurs racines familiales en Pologne, un même itinéraire leur ayant été proposé par la toile. Un autre chapitre, qui se nomme « Facebook 1940 », met en relation la famille de la narratrice avec une voisine de sa mère au temps de la guerre, grâce à la connexion simultanée faite par le réseau social Facebook. Puis, lors de ses recherches à Varsovie, elle retrouve des informations concernant sa famille sur Internet. Une photo lui est en effet présentée sur le site d’achat en ligne eBay, où des survivants de la guerre mettent en vente leurs photos d’antan. Dans le travail de reconstitution de l’histoire familiale de la narratrice, l’image de la « toile » Internet représente en l’occurrence une mémoire horizontale, dans le sens où elle agit par immanence et dans le partage au présent. Pour les membres d’une génération de trauma qui sont interreliés dans l’espace virtuel, cette mémoire rappelle en outre le travail de l’inconscient qui ramène des sources éloignées ou dissimulées de la mémoire collective à la conscience de l’individu, la narratrice dans le récit. Par ailleurs, selon Maria Roca Lizararu, « in the context of the archive and archival search, the narrator’s frequent use of the Internet points to an interesting supplementation of the more institutionalized archival and memorial spaces in the text » (2018, 178). L’espace virtuel d’Internet permettrait ainsi une méthode de recherche du passé qui évolue à l’écart des lieux établis, et évoque l’image d’une mémoire collective non pas uniforme, mais se composant de plusieurs mémoires en partage et en mouvement continuel. La narratrice semble toutefois conserver un regard critique sur cet univers virtuel qui peut, sous certains aspects, présenter l’image d’un passé prétracé, ne pouvant toutefois pas remplacer la recherche sur les lieux réels, malgré l’illusion d’un savoir libéré. Elle dira ainsi : « je n’avais toujours pas de réseau, aucun accès aux mamelles de l’univers, aucune protection, pourtant je ne bois pas de lait du tout, mais je suivais la voie lactée, la voie lactée d’un agriculteur et éleveur [son grand‑père] » (Petrowskaja 2015, 240). Partant de ces différents mouvements du fonctionnement de la mémoire et des images spatiales que nous en offre la narratrice, nous allons désormais aborder les lieux géographiques qui sont habités par une mémoire du trauma.

Mémoire des lieux

En analysant les travaux de Paul Ricœur sur la mémoire, Henri Rousso nuance les propos du philosophe qui attribue à la mémoire le rôle matriciel de l’Histoire, au détriment des autres sources qu’utilisent les historiens, affirmation « qui se fonde sur l’idée que toutes les traces du passé qui ont pu nous parvenir ont traversé le temps portées par des sujets doués par définition de mémoire, partielle ou partiale, peu importe. Cette approche privilégie un accès au passé via un témoin » (2013, 42-43. L’auteur souligne). Si Ricœur met ainsi l’emphase sur la part de vécu du passé, l’objet de mémoire est, selon Rousso, tout autant porteur du passé. L’historien donne l’exemple d’un obus ou d’une photo qui, retrouvés sans témoin, c’est‑à‑dire sans plus personne pour en expliquer la présence (dans le cas de l’obus) ou pour dire ce qu’elle représente (dans le cas de la photo), expriment un élément d’événements passés. Il explique : « Si l’archive fonde ici la mémoire, lui offre souvent un support […], c’est elle qui se trouve alors investie d’un caractère matriciel et non la mémoire » (43). L’archive est définie comme « la saisie sur l’instant, certes par un sujet, une plume, un œil, d’un fait qui me sera transmis non par le souvenir mais par sa pérennité matérielle » (43), et elle s’adresse alors à une mémoire au présent. Nous pouvons transposer le caractère à la fois matériel, muet, mais significatif d’un fait, propre à l’objet d’archive tel que défini par Rousso, au lieu de mémoire. Cet espace peut dès lors être lu comme générateur et gardien de la mémoire du passé. Sa forme nous permet également de discerner différents mécanismes de la mémoire de l’Histoire. J’analyserai ici, tout d’abord, les lieux institutionnalisés visités par la narratrice de Peut-être Esther. Je m’intéresserai ensuite au cas de la ville de Kalisz, puis à celui du ravin de Babi Yar qui a été un lieu de massacre durant la Seconde Guerre mondiale.

Au fil du récit, la narratrice visite notamment deux lieux de mémoire institutionnalisés : le musée d’histoire à Berlin, qu’elle visite avec sa fille, puis le mémorial du camp de concentration de Mauthausen. Au cours de ces deux visites, la consternation la frappe. Au musée, un rapport froid et marchand est établi entre les visiteur·se·s à la section consacrée aux victimes de la Shoah : « il [un visiteur dans un groupe] voulait me dire que la visite guidée n’était pas gratuite et que je devais absolument payer, sans quoi nous serions des voleuses, ma fille et moi, comme si nous avions volé cette histoire à huit euros » (Petrowskaja 2015, 45). Au mémorial du camp de concentration de Mauthausen, le premier contact de la narratrice avec le lieu de trauma se fait par la rencontre avec une bureaucratie impersonnelle et indifférente. Après une longue attente au téléphone, une voix lui répond de façon presque mécanique, et la narratrice remarque : « Je suis la cliente. La femme à l’autre bout du fil est la prestation. Elle travaille et je suis la réceptrice de son travail. Je sais que la femme a dit à la fin de sa phrase quelque chose comme Personne ne répond » (223). De plus, la visite se trouve sur le chemin d’une randonnée à vélo, et plusieurs visiteur·se·s viennent simplement y accomplir leur routine sportive. Ces situations soulèvent la question de savoir à quel moment un lieu de trauma perd la présence de son histoire, et à quel moment il tombe dans une neutralité abstraite? Quand est‑ce qu’un lieu de mémoire devient un simple lieu à connaître et non pas un lieu à ressentir pleinement? À ces interrogations, Dora Osborne répond que la surabondance d’informations rationnelles a fini par limiter toute approche humaine du lieu, le transformant en lieu de savoir plutôt qu’en lieu de recueillement. Elle commente ainsi ce passage de Peut-être Esther : « The narrator is looking for traces of her grandfather, who was interned there briefly as a prisoner of war, but finds that his true identity has been lost in the drive for documentation » (2016, 266). L’accumulation d’informations historiques, au nom de l’objectivité prônée par la recherche en histoire qui restreint le travail d’imagination des individus, enferme la mémoire du lieu dans le savoir rationnel qui finit par être, d’une certaine manière, déshumanisant. La narratrice se demande ainsi : « À partir de quel chiffre disparaît l’être humain? » (Petrowskaja 2015, 257).

Face à d’autres lieux de mémoire porteurs d’un trauma, la narratrice sera confrontée, à l’inverse, à une mémoire ressurgissante. Lors de son passage dans la ville de Kalisz en Pologne, lieu natal de ses ancêtres, la narratrice obtient l’aide d’une femme musulmane, Pani Ania, une « amoureuse de la ville de Kalisz » (130) qui lui fait découvrir un fait ignoré de la plupart des habitant·e·s de la cité : les pavés des rues sont constitués des pierres tombales du cimetière juif, un fait découlant d’un ordre donné par les nazis lors de l’annexion de la Pologne. La narratrice remarque : « C’était un système d’extermination à sécurité multiple. Qu’on le sache ou non, quiconque parcourt les rues de Kalisz foule aux pieds ces pierres tombales » (131). La volonté des nazis d’éradiquer le peuple juif s’est ainsi poursuivie jusque dans la mort, le vol des pierres tombales rendant impossible un hommage au cimetière. La narratrice rajoute qu’« il y a quelques années » (131) toutefois, suite à la mise en place d’un nouveau système de canalisation, certains pavés ont alors été retournés et des lettres hébraïques sont apparues. Cette suppression de toutes traces d’une mémoire juive n’a alors pas atteint son objectif, puisque la matérialité des pierres tombales, en étant réutilisées, a été en quelque sorte conservée, pour aujourd’hui réapparaître aux yeux des passant·e·s averti·e·s. Toutefois, Dora Osborne précise :

Yet the traces that remain despite the attempt to eradicate them do not form part of any recognized or recognizable memorial […], and passers‑by pass over the stones unaware of their significance. […] In their present manifestation – displaced, mutilated, and dispersed – they [the traces] can only serve as reminders. (2016, 262)

Ce lieu de mémoire n’en est ainsi pas un au sens où l’entend Pierre Nora, puisqu’il n’est pas investi d’une reconnaissance collective et officielle. Il est, au contraire, mutilé et ignoré. Seul l’individu qui connaît le récit du lieu détient les véritables grilles de lecture pour reconnaître le trauma dissimulé, y investir de façon personnelle la part de symbolisme et trouver, lors de sa traversée des rues de la ville, une fonction de rappel. Ces objets d’archive sont également la représentation d’une sorte de mémoire involontaire, voire insurrectionnelle : ce terme met en avant l’agentivité que peut prendre la mémoire d’un lieu de trauma, trouvant des voies subversives pour manifester son existence. Ces archives sont la marque d’un passé traumatique qui ressurgit physiquement et surprend les passant·e·s, comme un élément de l’inconscient de la ville de Kalisz qui refuse de disparaître. Le lieu revêt ainsi un pouvoir de provocation contre la violence qui lui a été imposée. Le cas de la ville de Kalisz illustre bien ce qui est souligné par Aleida Assmann : « According to Heiner Müller, traumas are mnemonic dynamite, which sooner or later will explode » (2013, 321). Pour l’individu qui subit le choc de cette découverte, comme la narratrice de Peut-être Esther, l’information qui concerne l’origine des pavés de la ville a un caractère saisissant, qui laisse le champ libre à une réflexion personnelle sur l’Histoire.

Enfin, un autre type de mémoire de trauma occupe l’espace d’un lieu de massacre, celui de Babi Yar, qui fait l’objet de tout un chapitre du récit de Petrowskaja. Babi Yar est un ancien ravin qui se trouve dans la ville de Kiev, en Ukraine. Il est reconnu comme étant le lieu du plus grand massacre par balles lors de la Seconde Guerre mondiale : « on dit que c’est le massacre à la fois le plus court et le plus meurtrier de l’Holocauste. On a tué 33 771 personnes en deux jours. Un chiffre étrangement précis. Et plus tard encore 17 000 juifs, et par la suite on a arrêté de compter » (Petrowskaja 2015, 180), informe la narratrice. Le ravin de Babi Yar a contenu les corps des victimes qui ont été par la suite brûlés par les nazis afin de supprimer toute trace de leurs crimes. Après la guerre, les autorités soviétiques ont décidé de recouvrir le ravin de terre et de le faire ainsi disparaître, renforçant par là le travail d’effacement des traces du massacre initié par les nazis. Leur première tentative, en 1961, a toutefois provoqué un écoulement de boue provenant du ravin qui a causé la mort de centaines de personnes. Babi Yar est alors devenu le théâtre non seulement d’une mémoire censurée, puis bafouée, mais aussi d’une mémoire qui, au final, ne peut être apaisée, comme si la dissimulation du trauma rendait le deuil impossible. On songe ici au concept freudien de refoulement : Babi Yar est le lieu du retour d’un refoulement forcé, car le trauma n’ayant pu se manifester à la conscience collective, il se fait sentir autrement (Freud 1916, 30), en causant de nouvelles morts violentes. De plus, le fait que les autorités aient interdit toute commémoration sur le lieu du massacre a profondément marqué la mise en récit mémorielle de la famille de la narratrice. Ne pouvant pas y investir un affect, parce « qu’on leur avait volé leur passé, leur deuil, leurs lieux » (Petrowskaja 2015, 184), l’événement est passé dans leur mémoire au niveau du mythe, ce qui a créé un certain détachement : « Cet événement avait pour eux [la famille de la narratrice] des aspects mythiques, il n’était plus accessible à nous autres humains, un fait incontestable qui n’autorisait aucune vérification » (191).

Finalement, lorsque l’Ukraine a obtenu son indépendance en 1991, chaque groupe de victimes a été reconnu par un monument, ce que la narratrice critique amèrement : « Dix monuments, mais pas de mémoire commune, la sélection se poursuit jusque dans la commémoration. Ce qui me manque, c’est le terme “être humain” » (185). Babi Yar est donc devenu un lieu de mémoire officiel pour les juifs soviétiques de l’Europe de l’Est. Toutefois, la commémoration des morts a été recouverte d’enjeux politiques. La volonté de déshumanisation de la politique nazie se trouve paradoxalement perpétuée dans le lieu de mémoire puisque les monuments séparent et identifient les victimes selon les mêmes critères qui ont déterminé leur mort. La narratrice est donc à la fois heurtée par ces monuments qu’elle juge inappropriés, mais également par la reconversion du lieu de massacre en un parc où circulent familles et sportifs. Selon Dora Osborne, « the physical form of the ravine becomes a topographical symbol for the traumatic loss sustained in the massacre, but also for the subsequent gap in Kiev’s official, collective memory » (2016, 266).

Il apparaît, en vue de tous ces éléments, que le lieu traumatique étant habité d’une mémoire qui lui est propre, la reconnaissance de son histoire est primordiale. Par ailleurs, la mémoire individuelle exige un espace géographique où peut se loger la conscience des événements, sans quoi l’absence de lieu les relègue dans un temps insaisissable et menacé de disparition qui leur enlève, finalement, toute réalité concrète. Nous arrivons alors à une préoccupation centrale pour la narratrice : comment peut‑on ou doit‑on commémorer les victimes dans un lieu de trauma?

Le lieu de commémoration

Lors de sa visite à Babi Yar, la narratrice ressent clairement un fossé qui la sépare des autres personnes présentes sur le lieu. Deux réalités différentes sont vécues dans le même espace‑temps :

Était-ce ici? Les gens se promènent, parlent, gesticulent au soleil. Je n’entends rien. Le passé avale les bruits du présent. Plus rien ne s’y ajoute. Aucun espace pour du neuf. J’ai l’impression que ces promeneurs et moi évoluons sur des écrans différents. Y a‑t‑il dans leur gestuelle quelque chose qui trahit l’origine de la violence humaine? Ou la propension à se retrouver victime? Préférerais‑je que Babi Yar ressemble aujourd’hui à un paysage lunaire? Exotique? Toxique? Tous les gens dévorés par la souffrance? Pourquoi ne voient‑ils pas ce que je vois? (Petrowskaja 2015, 180)

C’est l’esprit du lieu que la narratrice éprouve, et elle aspire à ce qu’il soit visible pour toute personne pénétrant dans un lieu qui, selon elle, est paralysé par un trauma. Elle sent dans son corps et par ses émotions – par un manque d’oxygène, par exemple (177‑178) – la présence du passé qui y habite. Pour Maria Roca Lizarazu, « the relationship with these sites is a spatial and embodied one, not a personal and familial one » (2018, 188). Précisons toutefois que, bien que le lieu porte en lui‑même l’atmosphère du crime, les sensations de la narratrice sont bel et bien amplifiées par son histoire familiale, puisque l’objectif initial de sa venue dans ce lieu de trauma est de reconstituer le passé de sa famille, indissociable du passé collectif. Le récit de ses ascendants morts à Babi Yar pose une grille de lecture sensible sur ce lieu, même si elle tend à dépasser son deuil familial pour rejoindre celui de toutes les victimes. Le même type de lecture du lieu se produit lors de son voyage à Varsovie :

J’ai vu au bout de l’une de ces longues rues de vieilles maisons à moitié détruites. Elles gisaient là comme des livres ouverts, nues, l’intérieur tourné vers l’extérieur […]. Elles étaient en grande partie démolies, seuls la reliure et le dos du livre étaient encore debout, le contenu avait été arraché (Petrowskaja 2015, 73).

L’image offerte par Katja Petrowskaja dans cette citation, celle de livres au contenu arraché, permet de comprendre que les lieux de trauma sont perçus par la quatrième génération, qui n’a pas accès aux témoignages directs des survivant·e·s, comme étant les lieux d’une histoire présente, mais muette, une histoire sans lecture. Toutefois, l’émotion qui leur a été transmise et qui les a incité·e·s à entreprendre le voyage leur permet d’entendre les voix silencieuses d’un lieu. L’ambivalence de cette transmission et de l’émotion éprouvée sur les lieux de trauma par les générations de la post‑mémoire est mise en évidence par Marianne Hirsch dans son analyse du roman de Saidiya Hartman, Lose Your Mother : « If her narrative, like other second and subsequent generational stories of “return” to places not visited before, attempts to reclaim some form of memory or connection to the objects and places of the past, it is only while making evident the irreparability of the breach » (2012, 213). La nouvelle génération opère donc un travail de recherche historique afin de trouver les traces matérielles, mais nécessairement inaccessibles, des événements qui vont lui permettre de représenter les affects que constitue le legs mémorial. Dora Osborne affirme ainsi qu’étant un « work of researching (as opposed to remembering) the past, Vielleicht Esther is a pivotal example of an “archival turn” in memory culture » (2016, 256). La narratrice cherche en outre à rendre compte de l’aura du lieu, au sens que lui donne Walter Benjamin, et tel que l’explique Aleida Assmann : « Benjamin attributes the holy quality of the aura to the feeling of remoteness and strangeness. An auratic place in that sense does not promise an unmediated experience; it is, rather, a place where the unbridgeable gap between present and past can be experienced » (2013, 322). Ainsi, un lieu de trauma peut faire ressentir à un individu la distance temporelle qui le caractérise, distance qui, paradoxalement, le rend aussi inatteignable. Le silence du lieu rend donc caduque la notion de lieux de mémoire théorisée par Pierre Nora puisque, comme l’affirme aussi Aleida Assmann, « the defining feature of the place of trauma is that its story cannot be narrated » (2013, 312).

Toutefois, la narratrice se demande : « Comment commémorer cette moitié de ville? Et comment peut‑on encore vivre ici? Si l’on incrustait dans le trottoir, comme à Berlin, une pierre d’achoppement pour chaque victime, les rues de Varsovie seraient entièrement pavées de pierres dorées » (Petrowskaja 2015, 102‑103). Varsovie a été le théâtre d’un trop grand nombre de meurtres pour qu’il soit possible d’y honorer individuellement chaque victime ou pour trouver une façon adéquate de commémorer leur mémoire. Un médium demeure toutefois nécessaire pour offrir une mémoire aux victimes et au lieu, pour parler de ce qui est paralysé par la terreur. Ce que la narratrice comprend bien, c’est le rôle que peut jouer la littérature pour combler les manques de cette mémoire perdue, pour lui redonner une histoire, et pour permettre à la mémoire collective de trouver un espace de vie et de mouvement. Le récit présente ainsi des événements pour lesquels la littérature constitue un moyen de résistance face à l’effacement de la mémoire. Le massacre de Babi Yar a en effet d’abord été reconnu grâce à la publication d’un poème russe d’Evgueni Evtouchenko en 1961. L’événement est relaté par la narratrice : « Il semblait que ce malheur universel n’était plus sans abri, que l’on avait réussi à rétablir l’honneur de la mémoire » (Petrowskaja 2015, 184).

De plus, le travail même de réécriture de l’histoire de sa famille, indéniablement liée à l’histoire des autres victimes, met en scène le rôle de la fiction. Ainsi, elle insère un élément dans l’histoire de son père, un ficus qui lui aurait permis de rester en vie, sans que son parent ne soit toutefois certain du souvenir. La problématique qui oppose la véridicité de l’Histoire et le vraisemblable de la littérature amène à réfléchir sur la question du rôle de la fiction dans la mémoire historique. Selon l’analyse de Dora Osborne, « through a play on the word “Fikus”, the plant comes to symbolize a fictional element in the story, “Fiktion”, but also a revealing slip about the way narrative can be used to conceal as much as reveal the truth » (2016, 267). L’œuvre de Katja Petrowskaja est par ailleurs semblable à une investigation historique par sa nature hybride, mélangeant différentes archives, telles que des photographies ou des lettres. Mais du fait qu’il s’agit d’une narration flirtant avec la fiction, Peut-être Esther offre paradoxalement une relation au passé plus intelligible que les récits produits par le domaine historique qui, dans son désir d’objectivité, fait disparaître la possibilité d’une compréhension totale quand les sources restent absentes ou trop abstraites. La narratrice joue ainsi elle‑même à s’identifier au conditionnel pour appréhender les possibilités qu’offre la fiction : « j’essaie moi‑même tous les rôles, comme s’il n’y avait pas de passé sans un comme si, un si ou un au cas où » (Petrowskaja 2015, 44). La mémoire individuelle ou collective possède elle‑même sa propre agentivité, qui s’épanouit dans un espace sans contrainte, celui de l’imagination qui trouve un lieu d’habitation dans la littérature.

Maria Roca Lizarazu, empruntant la pensée de Hanna Tzschentke, rapporte également que « Petrowskaja’s writing functions similarly to Yevtushenko’s poem – both try to provide a space and a “home” for marginalized and abandoned memories, thus challenging the official political discourse » (2018, 183). Le récit à la fois historique et mémorial qu’est Peut-être Esther constitue ainsi un exemple de travail de résistance contre la neutralisation, l’absence et la perte de la mémoire dans les lieux de trauma. L’historien Ivan Jablonkla éclaire de ses analyses cette nouvelle forme de littérature : « si littérature du réel il y a, elle est plus cognitive que réaliste. […] La littérature‑science sociale peut se définir comme un texte sous‑conditions […]. Recherche dans le réel, recherche sur soi : cette littérature bénéficie de la réflexivité des sciences sociales » (2017, 312‑313). La narratrice est ainsi en perpétuelle interrogation face à l’impossible vérification de l’histoire qu’elle brode, et ses questions amènent le·la lecteur·rice à s’interroger et à redéfinir l’éthique de la forme de représentation du passé. Le comment de la commémoration est donc un investissement de la notion d’être humain, qui implique l’affect mais aussi la liberté d’expression.

Finalement, la particularité de cette génération d’arrière‑petits‑enfants qui voient disparaître les membres de leur famille rescapés de la guerre, et qui perdent avec ces disparitions le témoignage vivant d’un passé traumatique, est celle de comprendre. Il y a donc, dans cette quatrième génération, un déplacement de l’appréhension de la mémoire. Il ne s’agit plus d’un « devoir de mémoire » tel qu’il a été imposé dans l’après‑guerre comme devoir moral à l’égard des victimes, mais d’un « travail de mémoire », selon les termes de Paul Ricœur : « ce que réintroduit également pour Ricœur la notion stratégique de travail, contre les “détournements pervers” opérés par les abus de mémoire, c’est la question de notre responsabilité : les troubles de la mémoire ne sont pas seulement subis, nous en sommes responsables » (Delacroix 2013, 56). Ce travail est également à entendre au sens de conservation du passé, de réminiscence pour des lieux qui demeurent muets, mais aussi au sens d’un travail de deuil à travers le récit humain de victimes souvent changées en éléments d’une connaissance abstraite qui perpétue, d’une certaine façon, l’effet de la volonté qui les a déshumanisées. Myriam Revault d’Allonnes pointe cette impersonnalité de l’information « qui confirme a contrario la volonté des tueurs de réduire les victimes à des échantillons, à des unités interchangeables. […] (Hannah Arendt parle de “sauvetage poético-narratif” à propos du récit qui sauve de la destruction totale) » (2013, 205).

C’est aux autres que s’adresse en définitive la dernière génération. Selon Myriam Revault d’Allonnes, le rôle de la quatrième génération tient dans la transmission d’un passé qui doit déterminer le présent : « L’implication éthique ne tient pas à la matière du récit, mais à la possibilité de son partage, du partage de l’expérience dont il témoigne. […] L’éthique de la représentation, c’est la transmission » (214. L’autrice souligne). Cette génération est un médium entre les rescapés disparus, via les traces qu’ils ont laissées, et leurs contemporains à qui elle veut communiquer une réalité qui a frappé non plus des morts lointains, mais des ayant‑vécus comme l’exprime Paul Ricœur (2000). Ce travail actif de recherche et de commémoration que produit cette nouvelle génération est ainsi explicité par la narratrice lors de son voyage en train vers le camp de concentration où son grand‑père a été enfermé : « à croire que seul leur savoir [des autres voyageurs] donnerait un sens à mon voyage et me permettrait de proclamer pèlerinage mon entreprise privée. Et, bien que j’aille seule à Mauthausen, je le fais pour tous les autres voyageurs du train, sans leur demander » (Petrovskaïa 2015, 249). Le terme de « pèlerinage » fait apparaître le caractère sacré de la mémoire, face auquel la collectivité, ici la communauté des lecteur·rice·s, est invitée à jouer son rôle, celui d’écouter. Le travail de deuil passe en effet par un public attentif à la mémoire.

Les lieux géographiques ont, au terme de ce « travail », retrouvé leur véritable identité qui ne peut être simplifiée ou catégorisée par la tyrannie d’un discours unique. À cet égard, l’exemple de la ville de Varsovie est flagrant, comme le souligne la narratrice : « Il suffit de prononcer les mots “Varsovie” et “Juifs” pour que tout le monde parle du ghetto, comme si c’était un processus mathématique, Varsovie plus Juifs égale ghetto. Les historiens disent ghetto, mes amis disent ghetto, Internet aboie ghetto » (99). C’est donc par une mémoire qui rassemble différents champs de compréhension – l’histoire, l’anthropologie, la généalogie, la philosophie – et par une perpétuelle réflexion quant au regard que chacun·e se doit de porter sur un passé présent dans la mémoire collective, que l’œuvre de Katja Petrovskaïa présente l’évolution d’une mémoire d’un trauma qui ne peut être appréhendée. Les lieux de trauma et la fiction que met en branle la littérature du réel se répondent, l’un permettant à l’autre de se construire et l’autre permettant à l’un de se lire, dans le dessein de comprendre et d’habiter le monde, de donner un espace de commémoration à une humanité décimée qui a été présente dans l’ici.

 

Peut-être Esther est un récit qui permet aux lecteur·rice·s d’accompagner la narratrice dans un travail de reconstitution d’un passé victime d’une volonté d’extermination, en voyageant à travers différents pays d’Europe de l’Est : Allemagne, Russie, Pologne, Autriche et Ukraine. Les difficultés de la reconstitution d’une histoire amènent à produire un récit de l’hypothèse dont le titre est révélateur. Les mouvements de la mémoire prennent une direction horizontale lorsqu’il s’agit d’une identification intragénérationnelle, si l’on se réfère à la terminologie utilisée par Marianne Hirsch. La mémoire prend également une direction verticale lorsqu’elle concerne les rapports intergénérationnels qui impliquent la superposition du passé au présent. La narratrice fait ainsi de nombreuses allusions à la mythologie grecque, qu’il s’agisse de l’Odyssée pour représenter la démesure de son voyage, ou du mythe de Sisyphe pour marquer le découragement inhérent à une entreprise frappée par l’impossibilité de trouver ce qui n’est plus que trace. Par ce voyage en des lieux emblématiques pour la mémoire du trauma, la narratrice ne trouve pas ce qu’elle était venue chercher, et n’arrive pas à combler les lacunes dans son histoire généalogique, mais ces lieux lui permettent de développer une réflexion éthique, politique et littéraire quant à la mémoire et à l’Histoire : c’est finalement l’espace de son récit qui permet de rendre un véritable hommage aux victimes. Elle montre ainsi le travail de recherche opéré par la quatrième génération, génération de la post‑mémoire qui lutte contre l’oubli, travail qui est également celui du deuil des disparus. Le récit redéfinit finalement une mémoire collective, en rendant une histoire humaine aux lieux et un espace vivant à la mémoire.

 

Bibliographie

 

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——— 2012. The Generation of Postmemory : Visual Culture After the Holocaust. New York : Columbia University Press.

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Seminar : A Journal of Germanic Studies 52, no. 3 : 255-272.

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Pour citer cet article: 

Tirkawi, Tasnîm. 2020. « La poétique de l’espace : une topographie de la mémoire du trauma dans Peut-Être Esther de Katja Petrovskaïa », Postures, Dossier « Écrire le lieu : modalités de la représentation spatiale », n°31, En ligne <http://revuepostures.com/fr/articles/tirkawi-31>( Consulté le xx / xx / xxxx).